Refus d'enregistrement d'une plainte

« Aucune violence ne doit rester sans réponse », selon le 4ème plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.
De plus, depuis 2001, l’article 15-3 du code de procédure pénale prévoit que la police judiciaire est tenue de recevoir les plaintes déposées par les victimes d'infractions à la loi pénale et de les transmettre, le cas échéant, au service ou à l'unité de police judiciaire territorialement compétent.
De même, une circulaire de la direction des affaires criminelles et des grâces du 14 mai 2001 insiste : dès lors qu'une victime fait connaître sa volonté de déposer plainte, les officiers ou agents de police judiciaire doivent donc toujours enregistrer sa plainte par procès-verbal.
La charte de l’accueil du public et de l’assistance aux victimes, mise en place en 2004 et affichée dans l’ensemble des commissariats de police et des brigades de gendarmerie, le rappelle enfin dans son article 5, selon lequel :
Les services de la Police Nationale et de la Gendarmerie Nationale sont tenus de recevoir les plaintes déposées par les victimes d’infractions pénales, quel que soit le lieu de commission.

Les justifications les plus couramment rapportées : qu’en est-il ?

  • L’auteur des violences a porté plainte le premier contre la victime : « vous vous expliquerez quand vous serez convoquée ».

Ici, c’est tout simplement l’obligation de recevoir toutes les plaintes (art. 15-3 du Code de procédure pénale) qui n’est pas respectée, sous un motif non valable.

  • Les services de police ou de gendarmerie refusent parfois d’enregistrer les plaintes car ils seraient non compétents territorialement.

Toujours selon l’article 15-3 du Code de procédure pénale, la police judiciaire est tenue de recevoir les plaintes, et ce :
o quel que soit le lieu de commission de l’infraction (ex : vous pouvez vous rendre dans un commissariat à Marseille pour une infraction commise à Lille)
o quel que soit le lieu de résidence de la victime (ex : vous pouvez vous rendre dans un commissariat à Bordeaux, même si vous habitez Paris)
S’ils ne sont pas territorialement compétents, ils doivent tout de même prendre la plainte et la transmettre au service compétent.
En revanche, ce service non compétent territorialement n’est pas tenu d’enregistrer l’intégralité des déclarations de la victime de façon détaillée : ces éléments pourront être recueillis ensuite par le service qui sera chargé de l’enquête (circulaire 14 mai 2001).

  • Refus d’enregistrer une plainte sans la production d’éléments de preuve, comme un certificat médical.

Les policiers ou les gendarmes sont tenus de prendre la plainte, qu’il existe ou non pour le moment des éléments de preuve, peu importe qu’un certificat médical soit déjà fourni ou pas, d’autant plus que l’article 14 du code de procédure pénale les charge eux-mêmes de rassembler les preuves de la commission d’infractions.

  • Enregistrement de la plainte à condition que la victime accepte la médiation pénale

Selon l’article 41-1 du code de procédure pénale, la décision de faire procéder à une médiation pénale revient :
o au Procureur de la République (pas aux services de police ou de gendarmerie)
o après que la plainte ait été enregistrée et qu’elle lui ait été transmise (pas préalablement à l’enregistrement de celle-ci)
Ce même article ajoute qu’en cas de violences conjugales (exercées par le conjoint, partenaire de pacs, concubin ou ex) la médiation n’est possible que si la victime en a fait expressément la demande, et ne peut avoir de nouveau lieu si de nouvelles violences sont exercées (composition pénale ou poursuites). Les services de police ou de gendarmerie ne peuvent donc pas exiger que la victime accepte la médiation pénale, ni avant de prendre sa plainte, ni après.

  • Non reconnaissance de la qualité d’infraction

Certains faits relevant pourtant du Code Pénal ne sont parfois pas reconnus comme étant des infractions par certains services de police et de gendarmerie, qui refusent donc d’enregistrer les plaintes. Les violences conjugales en général, et certaines infractions qu’elles peuvent impliquer, sont particulièrement concernées :
o Les violences conjugales de façon générale (dont celles exercées par les ex).
Elles ne sont encore pas toujours reconnues par les services qui sont tenus d’enregistrer la plainte.
Il convient alors de rappeler que selon l’article 132-80 du code pénal :  "Dans les cas respectivement prévus par la loi ou le règlement, les peines encourues pour un crime, un délit ou une contravention sont aggravées lorsque l'infraction est commise par le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité."
Le texte précise que cela s’applique également aux infractions commises par les anciens conjoints, concubins ou partenaires de pacs, dès lors qu’elles ont été commises en raison des relations ayant existé entre l’auteur et la victime.
Les textes prévoient ensuite des peines aggravées, infraction par infraction (voir tableau de rappel des textes). Des faits de violences, même s’ils n’ont pas entraîné d’ITT, sont réprimés par le Code Pénal, et les services de police et de gendarmerie sont tenus d’enregistrer les plaintes des victimes de telles infractions. Le fait que l’auteur de ces violences soit un conjoint, partenaire, concubin ou même ex de la victime ne les en dispense pas, étant au contraire un facteur aggravant reconnu par le Code Pénal.
o Les violences psychologiques
Il a fallu attendre la loi du 9 juillet 2010 pour que ces violences soient explicitement reconnues dans le Code Pénal. Depuis, l’article 222-14-3 y prévoit que :
"Les violences (prévues par les dispositions de la présente section) sont réprimées quelle que soit leur nature, y compris s'il s'agit de violences psychologiques."
La jurisprudence reconnait ces violences depuis plus longtemps, et précise les contours de cette infraction: le délit de violences peut être constitué, en dehors de tout contact matériel avec le corps de la victime, par tout acte ou comportement de nature à causer sur la personne de celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou psychique caractérisée par un choc émotif ou une perturbation psychologique (Cour de cassation, chambre criminelle, 2 sept. 2005).
Exemples d’actes reconnus comme relevant d’infractions, issus de la jurisprudence : comportement menaçant, coups violents dans un mur ou une porte, envoi de lettres anonymes, appels téléphoniques répétés…
o Le vol
Il n’est pas forcément reconnu par le Code Pénal en tant qu’infraction, selon que l’auteur et la victime sont mariés ou non.
- S’ils ne sont pas mariés : le vol commis par l’un d’eux au préjudice de l’autre est puni dans les mêmes conditions qu’entre n’importe qui.
- S’ils sont mariés : en principe, le vol entre époux ne peut donner lieu à des poursuites.
SAUF
- quand les époux sont séparés de corps (jugement mettant fin à l’obligation de vie commune) ou autorisés à résider séparément
ou
- si le vol porte sur des objets ou documents indispensables à la vie quotidienne de la victime, tels que des documents d’identité, relatifs au
titre de séjour ou de résidence d’un étranger, ou des moyens de paiement.
Rappelons que sont également des infractions punies par le Code Pénal :
o Les menaces (de mort, de viol, de violences, de dégradations sur des biens…)
o Le viol y compris par un conjoint, concubin ou partenaire de pacs
o Le harcèlement par le conjoint, concubin ou partenaire de pacs, mais aussi les exs

  • Souvent, à la place de l’enregistrement d’une plainte, il est proposé de réaliser une main courante (ou un procès verbal de renseignement judiciaire,en gendarmerie).

Cependant, les faits consignés dans une main courante ne sont pas portés à la connaissance du procureur de la République, à l’inverse d’une plainte, et ne peuvent donc pas donner lieu à des poursuites (il s’agit seulement de garder une trace officielle des événements, qui pourra servir ultérieurement). Précisons que le protocole cadre annexé à la circulaire du 24 novembre 2014 réaffirme le caractère exceptionnel des mains courantes "subordonnées au refus exprès de la victime de déposer plainte, et dans la mesure où aucun fait grave n’est révélé".

Que faire en cas de refus d’enregistrer une plainte ?
- Montrer que vous connaissez parfaitement vos droits, présenter les textes issus du Code Pénal si besoin.
- Indiquer qu’en cas de refus d’enregistrer votre plainte, vous saisirez le Défenseur des Droits (procédure gratuite)
par le formulaire de saisie en ligne http://www.defenseurdesdroits.fr/fr/contact
par courrier à l’adresse suivante :
Défenseur des droits
LA ROCHE-SUR-YON CEDEX
Préfecture de la Vendée
Bât. A1 - 1er étage
Cité Travot - rue du 93ème R.I.
85022 LA ROCHE-SUR-YON CEDEX

Si le refus persiste :
- Essayer éventuellement auprès d’un autre service de police ou de gendarmerie.
- Se rapprocher d’un avocat ou d’une association.
- Adresser directement la plainte au Procureur de la République du Tribunal de Grande Instance du lieu de l’infraction, par lettre recommandée avec accusé de réception. Courrier au Procureur de la République

CONCLUSION :
Rien ne justifie un refus d’enregistrer une plainte.
Face à un tel refus, insister à l’aide des textes, et invoquer le Défenseur des droits. Si cela ne suffit pas, se faire accompagner ou adresser la plainte directement au Procureur de la République.

 

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